Je crise

John Atkinson Grimshaw. An autumm idyll. 1885

Je crise. Cela m’arrive de temps en temps. Une crise d’urticaire se pointe selon les humeurs des saisons. L’automne me plaît. Pourtant, je crise un peu plus depuis hier soir. Les oies blanches me saluent lors de leurs passages. Aujourd’hui, trois voiliers au-dessus de ma tête en cinq minutes. Je ne veux pas qu’elles se rendent à New York. Un holocauste sournois les accueillera à Manhattan. Je leur ai suggéré un détour par les Caraïbes. Mais une oie quand elle décide de faire l’oie. Alors, je crie et je crise.
 
Je crise de plus en plus à la lecture des médias : la commission de ceci, par là, la commission d’untel souci, par le haut du bas milieu. Les commissions de tout un chacun se font la guerre de la une pour nous forcer à réclamer l’armistice sur le sujet. Pas question de laisser se construire de telles rumeurs. À chacun sa commission. D’accord, mais sans oublier l’essentiel. Tout ce monde au-dessus de tout soupçon qui met notre monde sens dessus dessous pour des sous… sous les soupçons d’enveloppes de toutes les couleurs me donnent de l’urticaire couleur de révolution active anti tranquille. Moi, je crise pas mal sur celle des gaz de schiste. D’ailleurs, je ne suis pas toute seule. Le moratoire ne meurt pas de sa belle mort. Il y a anguille sous schiste et on ne s’en fout pas; on ne veut pas d’exploitation de schiste destructeur sur le territoire. On ne veut pas que nos fossiles remontent à la surface pour se retrouver dans l’air ou dans nos rivières. Et puis, il y a cette folie dite constructive… Ce refus d’enquêter sur cette constructive et lucrative instabilité de la confrérie des francs marteaux. Alors, je persiste et je crise.
 
Je crise surtout d’énormes crises littéraires. Tout l’été, j’ai lu et relus des auteurs plus captivants les uns que les autres. Tout d’abord, Larsson et les aventures de Millenium. Lu et relu trois fois. Lisbeth serait drôlement bienvenue dans les ordinateurs de nos hommes d’honneur au pouvoir. La confrérie des pirates nous Flannery O'Connor. Pupitredonnerait de quoi à lire et à rugir. Et puis, j’ai redécouvert des auteurs américains. Surtout Flannery O’connor, la plus grande des nouvellistes à mon avis. Flannery mérite que je lui offre une chronique digne de ce nom. Je reviendrai sur l’œuvre de cette magicienne avec calme. Pour le moment, je crise un peu trop haut et fort.
 
 
J’ai lu des auteurs italiens également. J’ai particulièrement aimé Willy Melodia d’Alfio Caruso. Ce Sicilien qui possède l’oreille absolue devient le pianiste attitré des mafiosi de toute l’Amérique. Une façon de voir l’évolution de notre histoire à travers les yeux d’un homme au dos tourné sur la vie. De la Sicile à Chicago, de New York à Washington, on ne tire pas sur le pianiste, mais on le tient drôlement occupé. Une belle lecture.
 
Je crise. Le verbe criser comme dans les notes de l’auteur et du traducteur de l’auteur de cette crise. Ce verbe d’action se pointe telle une nomination de temps en temps. Il dilate les saisons; replace les sautes d’humeur. Voilà. Entre deux crises, j’ai surtout beaucoup écrit. J’ai écrit et réécrit un roman jeunesse que j’ai remis à l’éditeur. J’ai écrit plusieurs nouvelles sur différents thèmes qui réfléchissent dans le recueil avant de prendre route. Quatre nouvelles de plus dans le recueil des shorts story. J’ai réécrit aussi la scénarisation de la première partie du roman en cours… Ouf! Vacances d’été, vous dites? Connais pas…
 
Je crise devant cette nappe de pétrole de 200 kilomètres cachée dans les profondeurs du golfe du Mexique ; je crise devant toutes ces catastrophes mondiales qui résultent de nos excès de pollution ; je crise devant les enfants de la famine d’Haïti, du Pakistan, du Niger et d'ailleurs ; je crise devant ces gens du voyage que l’on force à voyager ; je crise devant cette pelle énorme qui creuse des fosses moratoires ; je crise devant ce Tea party qui prend son thé avec Hitler ; je crise de la fonte de tous les icebergs de la terre et de la mer… Je crise d’octobre à septembre sur toutes ces crises qui enlisent le temps des cerises sous de noires chemises.
 
Je crise beaucoup en cet automne contre la loi C-32. Ce projet de loi qui s’acharne sur les droits d’auteur. Je n’ai pas l’intention de décriser à ce propos.
 
Heureusement, il y a Wajdi Mouawad, Villeneuve et Lepage pour calmer mes incendies et pour me réconcilier avec New York.
 
Et vous? Cela vous dit une petite crise sous la plume?
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Illustrations : 1. John Atkinson Grimshaw. Autumm. 1885| 2. Flannery O’Connor. Pupitre.

Commentaires

  1. Ma chère Mireille... Un destrier au petit trot, une tendresse. Quelques mots... À dire.
    Je t'embrasse...

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  2. >Gaëna: Il y a si longtemps que tes mots se lovent dans tes images. Toujours en sol majeur et si mineur. Le destrier au petit trot me touche...

    Je crise un peu moins, en douceur.

    Je t'embrasse au grand galop.

    >Carmelo: De votre lointaine et pourtant si proche de mon âme Belgique, vos mots me parviennent au coeur et me rendent encore plus CRAZY de votre amitié.

    Côté crazy avoué et peut-être à demi partagé.

    Je vous embrasse et pense à vous. Bons mots!

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  3. c lili qui prle c un joli texte

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