Nelligan et le OneO'clockDream 4




Les nuits d’octobre se transforment en opéra silencieux dans les bois de la petite chapelle de l’asile Saint-Benoît. Dès que Nelligan entend l’appel du chat fatal, il organise l’expédition nocturne clandestine vers la bibliothèque des anges. Cette mutinerie sous les étoiles lui rappelle le temps où il fuyait la belle Émilie, sa mère. Cette école buissonnière derrière les vitres sans givre lui redonne l’essence de vivre dans tous les sens. Dans l’imaginaire, il trouve la force de survivre comme au temps de sa bohême. Il se revoit vivant dans l’errance jusqu’aux bois célestes des anciennes asiles de la rue: les petites chapelles de Montréal.

Émilie a couru longtemps après son fils poète. Et pourtant, Émilie n’a jamais rendu visite au fou poète. Émilie Nelligan ne court plus depuis 1913.

David Nelligan n’a jamais voulu de fils poète. David a enfermé le fou poète dans la vieille armoire de l’asile de Saint-Benoît. David repose sous terre depuis 1924.

Gertrude Nelligan s’envole le 11 mai 1925.

Eva Nelligan parle vaguement de son frère qui divague sur les vagues d’un ivre hôpital…

Alors, depuis plus de dix-neuf nuits, Chopin dirige le récital des anges.

Depuis plus de dix-neuf OneO’clockDream, Nelligan écrit dans les marges des poètes marginaux de la bibliothèque des anges.



Nelligan profite de ces intermezzos imaginaires pour s’évader dans les mots de Rimbaud, Verlaine et Apollinaire. Sur le papier crème, il crie haut et fort les maux de ses soirs d’hivers sans verre. Envers et contre tous les perroquets verts de son univers, il navigue sur les vers libres des bateaux ivres… Entre les lignes, il dessine des lignes de fantaisies roses à tendre sur les lignes de son jardin sentimental peuplé de cygnes.

Le chat fatal devenu fou de musique danse sur les bons signes…

Chopin, le spectre de la bibliothèque des anges, croit que c’est mauvais signe…

À la fin du mois d’octobre, les jours de givre se rapprochent des vitres de l’asile. Combien de nuits, combien de OneO’clockDream reste-t-il au poète pour savourer cette douce liberté ?

À suivre…


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1. Illustration. Émile Nelligan. Asile Saint-Benoît-Joseph-Labre. Collection Nelligan-Corbeil
2. Illustration. Mireille Noël. Nelligan et Rimbaud. Collage.
3. Illustration: Émile Nelligan. Motifs du récital des anges. Poèmes autographes. Collection Nelligan-Corbeil

















Commentaires

  1. merci Mlle Mireille même si...
    ça me fait du triste ce long asilement, du triste tellement; diantre!

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  2. cette édition des poèmes-autographes m'a l'air fascinante! et j'ai retrouvé mes oeuvres complète de nelligan dont les feuilles ne sont pas encore toutes découpées...

    je me demande si ces poèmes-autographes s'y retrouvent... à suivre, comme les contes.

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