Contes de l'encrier: Marcel et le mot perdu 5





À son retour dans l’appartement de Paris, Marcel se montra d’humeur surprenante. Il s’empressa de prendre le thé avec Céleste afin de lui raconter les moindres détails de ce voyage au cœur de la mer fantastique. Il insista longuement sur ses curieuses rencontres qu’il avait eut le bonheur de faire à Balbec, puis il exhiba fièrement la lettre « F », la première lettre d’or récoltée auprès de la mer de la mère.

Céleste trouva son frêle écrivain fanatique de la fin dans une forme fantastique. Ils dansèrent une petite valse formidable et s’offrirent même quelques madeleines supplémentaires afin de calmer leurs faims. La fête de la quête du mot perdu dans le temps donna des ailes à Marcel. Désirant poursuivre sa recherche du mot de la fin, sans perdre de temps, il se mit au travail sur le papier fin.

Une tempête de mots prit bon vent dans la chambre.

Longtemps, il écrivit des mots bien ficelés, des phrases extrêmement bien fignolées, des métaphores de funambules, des pages et des pages de souvenirs festifs. Une frénésie fantasmagorique l’emporta dans une fresque fabuleuse. Il travailla longtemps et si bien que les carnets de la recherche du temps perdu s’emplirent de notes presque finales…

De temps en temps, il s’accordait une petite pause. Céleste profitait de cette accalmie pour ramasser les notes et colliger les bouts de papier sur les carnets. La fidèle cuisinière et gouvernante était la seule à pouvoir comprendre les petites pattes de bestioles de son drôle de maître du temps perdu. Seule Céleste pouvait remettre en ordre les mots perdus dans les carnets de la recherche du mot perdu dans le temps.

Marcel œuvra ainsi jusqu’au crépuscule. Épuisé, il tomba endormi entre les cahiers numéro 33 et 36. Il se laissa envahir par les rêves, les nuages divins de la nuit.

Le repos de l’écrivain chercheur de mot perdu et voyageur en mission dans le monde du maître du temps ne dura que quelque temps. Marcel ne perdait pas de vue la finalité de la recherche. Même dans ses rares instants de sommeil, il voyait danser des lettres d’or dans sa chambre.

Un peu avant minuit, une douce musique le tira du pays des songes. La petite sonate mystérieuse vint lui taquiner le cœur. Des bruits étranges se mêlèrent à la musique furtive. Les pas des destriers résonnèrent dans la rue. Le fiacre du maître du temps s’arrêta devant la porte de la résidence de l’écrivain.

Fidèle à sa promesse, Marcel se dirigea vers la voiture. De fines gouttelettes de pluie tombaient sur son chapeau melon. Heureusement, il avait revêtu sa chaude pelisse. Le brouillard se transforma en fins flocons de neige.

Une tempête blanche perdue dans le temps s’abattit sur le voyageur du temps perdu.

C’était un temps d’hiver… Marcel avait rendez-vous avec un mot perdu dans le futur et dans le temps.

À suivre…

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1. Illustration: James Jacques-Joseph Tissot. Hush !

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Commentaires

  1. C'est au pied de la lettre que l'on reconnaît l'écrivain.

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  2. Je commence évidemment à connaître vos thèmes favoris : la mer, la musique, l’enfance, une sorte de retour en arrière… c’est pourquoi le voyage dans le futur sera intéressant.

    Il y aussi les animaux. Il nous manque Cathy-chien.

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